[CRITIQUE FANTASIA 2025] – Stinker (Sasyq) -

***Stinker (Sasyq)*: E.T. l’extraterrestre Kazakh**

Stinker s’ouvre avec un personnage qui n’est pas particulièrement charismatique ou attachant, un vieil itinérant qui se nomme Sadyq (Bakhytzhan Alpeis) et qui a comme objectif de mettre fin à sa vie. Cependant, le scénario écrit par Sergey Litovchenko et Yerden Telemissov ne cherche aucunement à tomber dans le mélodrame et il aborde ce sombre objectif avec humour et légèreté. Les scénaristes vont même chercher à surprendre le public en lui faisant croire que l’aventure est déjà terminée après seulement quelques minutes. Heureusement, toutes les tentatives de Sadyq de s’enlever la vie sont infructueuses, ses échecs vont même mener à plusieurs moments cocasses où le spectateur aura le sentiment que l’humanité tout entière fait tout en son pouvoir pour empêcher l’itinérant d’arriver à ses fins. Ce ton comique est d’autant plus évident que ces séquences sont accompagnées d’une musique rocambolesque. Le vieil homme finit par lâcher prise quand la galaxie, sous la forme d’un voyageur extraterrestre, va attirer son attention et l’amener à réviser son intention.

Cette créature venant d’une autre planète ne va exprimer aucune animosité à l’égard des humains, ce qui vient inscrire Stinker dans la lignés de films comme E.T. The Extraterrestrial. À l’image de ce classique de la science-fiction, l’extraterrestre interprété par Chingiz Kapin est le résultat de prothèses et de maquillage plutôt que d’effets spéciaux générés par ordinateur. Au premier regard, le public sera peut-être surpris de voir qu’un film de 2025 priorise cette approche, mais il va certainement finir par être convaincu. Le costume a également la qualité d’offrir une certaine flexibilité à l’acteur lui permettant d’exprimer une certaine gentillesse et curiosité à travers ses mouvements. À cela s’ajoute, un riche travail de bruitage pour rendre crédible l’ensemble de ses mouvements.

Dans ce film nous provenant du Kazakhstan, le réalisateur Yerden Telemissov propose un récit mélangeant comédie et science-fiction qui renferme un message profondément humain. Le résultat fait chaud au cœur et devrait permettre au public de vivre de belles émotions. Bien que Stinker soit le premier long-métrage du réalisateur kazakh, ce dernier montre une belle maturité dans la direction de sa distribution. Cela est d’autant plus appuyé par la remarquable performance de l’acteur Bakhytzhan Alpeis qui interprète Sadyk et qui a reçu le prix de la meilleure interprétation par le jury de la section Cheval noir du festival. Avant de signer ce premier long-métrage, le réalisateur kazakh a pu se faire connaître comme acteur et cascadeur, il a travaillé sur les séries américaines Slow Horses et McMafia.

Comme plusieurs éléments du film le laissent croire, notamment un déplacement à moto avec l’extraterrestre caché sous une couverture, le classique de Steven Spielberg E.T. the Extra-terrestrial a servi d’inspiration au film Stinker. Malgré les quelques références au cinéma nord-américain, ce long-métrage se déroule dans un tout autre contexte. En effet, les évènements ont lieu dans un petit village du Kazakhstan qui est dirigé par un maire se prenant pour le monarque local. Ce dernier s’empresse de cacher la misère existant dans sa localité quand il apprend que le cortège présidentiel va emprunter une route passant à travers le village. Pour arriver à ses fins, il va mandater un policier (Zangar Akhmet-Qazy) de débarrasser la route de tous ses déchets et exiger que tous les commerces à proximité retapent leur devanture. Parmi les « déchets », il y a Sadyk (Bakhytzhan Alpeis), le protagoniste, un itinérant qui sera rapidement surnommé Stinker en référence à l’odeur nauséabonde qu’il transporte.

Stinker est un film chaleureux et amusant, mais certains éléments de l’intrigue manquent un peu de profondeur et sont sous-développés, cela se réfère principalement aux péripéties entourant le passage du convoi présidentiel et les personnages du maire et du policier. Ce duo est plutôt caricatural avec le maire méchant et égoïste, tandis que le policier bègue est maladroit et un peu simple d’esprit. L’apport des personnages auraient pu être plus considérable s’ils avaient eu plus de nuance dans leur personnalité et si la tendance autoritaire du régime avait été mieux exploitée. Cela est tout à l’inverse du quatuor que formeront Sadyk, la vieille propriétaire d’un dépanneur (Irka Abdulmanova), la petite fille de cette dernière (Ailin Sultangazina) et l’extraterrestre. Ces personnages, dont les interactions vont habilement évoluer, sont particulièrement attachants et ils se démarquent par leurs sensibilités.

D’un point de vue visuel, les belles images lumineuses, détaillées et précises du Kazakhstan sont accompagnées d’une superbe musique composée par l’artiste MUINZODA qui met de l’avant une multitude d’instruments, ses thèmes musicaux proposent des sons de synthétiseurs à l’image de l’être extraterrestre qui est au centre du récit.

Dans l’ensemble, le public va retenir que Stinker est un récit empreint de gentillesse et d’humanisme. Le long-métrage offre une vague d’espoir à un monde qui en a certainement besoin, il montre également que les personnages peuvent s’entraider et passer à travers les souffrances et les difficultés qu’ils ont vécues. Malgré un scénario assez prévisible et formulaïque, Stinker ne rencontre aucune difficulté à faire vivre à son auditoire des moments forts en émotions.

7/10

Stinker (Sasyq) a été présenté en première nord-américaine dans la section Cheval noir de la 29^e édition du festival Fantasia, en présence du réalisateur Yerden Telemissov et de la productrice Laura Yergaliyeva, le dimanche 20 juillet 2025 et le mardi 22 juillet 2025.

Pays: Kazakhstan
Année: 2025
Durée: 96 minutes
Genre: Comédie, Science-Fiction
Audio: Kazakh/Russe
Sous-titres: Anglais
Réalisateur: Yerden Telemissov
Producteur: Gulnara Sarsenova
Scénario: Sergey Litovchenko, Yerden Telemissov
Interprètes: Irka Abdulmanova, Zangar Akhmet-Qazy, Dulyga Akmolda, Bakhytzhan Alpeis, Chingiz Kapin